3- L’Eglise et les lossyans
(je pense que l’article n’est pas complet, et manque un peu de détails, mais pour le coup, je ne savais pas comment avancer, alors, le voici tel quel, et j’y reviendrais)
L’Eglise du Concile a, comme j’en ai parlé ailleurs, une influence énorme sur la culture des peuples lossyans, qui s’étend sur toutes les Mers de la Séparation. L’Eglise est la religion dominante, et elle n’en tolère d’ailleurs pas vraiment d’autre. Il n’y a guère que les Jemmaï, les Apostats, les Dragensmanns, et les San’eshe, qui la rejettent et ne soient pas sous sa coupe. Pour toutes les grandes cités-états de Loss, et malgré la pérennité de petits rituels privés et de cultes locaux ici et là, toujours vivaces, puisque tolérés dans le cercle privés, la foi en l’Eglise du Concile est la norme. Et le respect de ses dogmes des principes de vie.
Mais les choses ont quelque peu évolués et se sont assouplis, parfois au corps défendant des ordinatorii, concernant le respect des Dogmes, et de la parole du Concile. Les effets combinés de l’influence des grandes corporations civiles, avec en tête la tentaculaire Guilde des Marchands, et des progrés de l’expansion de la littérature et du savoir moderne, ont quelque peu lézardé le socle de l’énorme pilier que représente l’ensemble des Dogmes, et des codes de l’Eglise. Elle-même admets, bien que du bout des lèvres, que certains principes et codes devraient être révisés, et qu’une tolérance plus large est souhaitable vis-à-vis des contrevenants. Cependant, les Prophètes ne remettent pas en question les Dogmes eux-mêmes (voir ci-dessus), et oser les interroger, et supposer qu’ils devraient être discutés, est en soit toujours une Hérésie qui attire les Inquisiteurs comme la petite vérole sur le bas-clergé.
Le rapport des civils à l’Eglise reste donc compliqué, mais dans l’ensemble, il s’agit de dévotion religieuse relativement forte, de respect de l’autorité des prêtres, et du pouvoir des ordinatorii, de crainte superstitieuse du Concile, et de peur légitime de ses agents et de ses moyens. L’Eglise possède nombre d’esclaves rousses Chanteuses de Loss, le plus souvent dédiés à la distraction et aux plaisirs, mais comme vous l’aurez compris si vous avez lu l’article sur les Chanteurs de Loss, celles-ci sont aussi des armes terribles. Les Espiciens ont souvent une esclave parfaitement conditionnée en guise de garde-du-corps, qui à elle seule vaut bien un peloton de légionnaires, et dont ils n’hésitent pas à user -et à sacrifier au besoin.
Les lossyans respectent et aiment les prêtres, en général. Ceux-ci sont proches du peuple, les prêches réguliers, tous les vendredi soir, dans les temples, rassemblent nombre de fidèles, les hospices de l’Eglise sont ouverts gratuitement aux gens pauvres qui ont besoin de soin, et les temples distribuent souvent de la nourriture aux nécessiteux. Les codes et règles concernant les femmes et les ordinatorii sont appliqués en général plutôt souplement, tout du moins hors de l’Hégémonie, et les diacres et assistants des prêtres prennent à cœur leur travail de soulager les maux de l’humanité, et de préserver la civilisation, et la faire prospérer sous leur bienveillante surveillance. Ce sont des pères, des oncles, des ainés, pour le petit-peuple.
Autant que des tyrans mortels et impitoyables.
L’Eglise manie allègrement le bâton et la carotte. D’un coté, pauvres et indigents peuvent être soignés, et aidés, de l’autre, ils peuvent être asservis sans pitié, pratiquement sans besoin d’explication, et au mépris des lois des cités-états locales, quand encore celles-ci ne leur donne de toute façon pas raison par défaut. L’Eglise se considère intouchable, toute-puissante, et supérieur à toute autre autorité. Et dans les faits, c’est assez proche de la vérité. Le despotisme, les abus de pouvoir, les chantages, les extorsions, la tyrannie cruelle, les sévices gratuits, l’asservissement par intérêt financier ou luxure, y sont monnaie aussi courante que ces prêtres généreux et le cœur sur la main dont la seule ambition est de montrer que l’Eglise du Concile aime et protège ses ouailles… tant qu’ils marchent sur la ligne tracée par l’Ordinatori.
Il serait donc difficile de présenter une politique vraiment unique dans l’administration et les rapports de l’Eglise à ses fidèles. On en revient à ce mélange de dévotion, de respect, de crainte, et de peur légitime qui caractérise un peu le regard des lossyans à l’Eglise. Qui plus est, l’Inquisition est omniprésente -même quand elle est absente- et les temples se mêlent énormément des aspects de la vie privée lossyanne, au travers des rituels de la naissance, des passages à l’âge adulte, de l’éducation, des mariages, des rites funéraires, de l’administration des biens et des avoirs de l’Eglise, du commerce et de la finance, mais aussi de la défense, et des forces armées. On ne peut oublier l’Eglise, et son emblème, le Cercle d’Argent, est partout.
L’Eglise gère donc des écoles, des universités, des hospices. Ses temples sont souvent attenants à des orphelinats et des casernes, mais aussi des Maisons des Esclaves réputés pour leur dureté et la cruauté du Haut-Art qui y est pratiqué, et qui fut longtemps l’apanage des ordinatori. Mais elle a aussi souvent des biens fonciers et immobiliers, gérant des terres et des villages, des corporations d’artisans qui lui payent écot, des chantiers navals, et des compagnies marchandes. Bref, l’Eglise est en effet puissante, riche, influente, et répandue partout.
Les rites courants dans la vie d’un lossyan :
Chaque maison lossyanne, en plus souvent de petits autels aux esprits, ancêtres, ou aux anciens dieux, doit avoir, près du foyer, ou face à la porte d’entrée, un grand bougeoir où doit trôner une chandelle blanche posée dans un « cercle d’argent » (souvent un cercle de terre cuite blanche, pour les plus pauvres). La chandelle est allumée à chaque tombée du jour, pour au moins quelques instants de prière. Les plus riches laissent la chandelle brûler toutes les nuits.
Tous les vendredi soir, le temple ouvre ses portes de la tombée du soir, à minuit, pour un culte, avec des prières, un sacrifice rituel animal (et jamais humain, je précise), des prêches, des sermons, et la bénédiction de la foule pendant que sont rappelés les Dogmes. C’est aussi bien un rite sacré, qu’une fête et une occasion de se rencontrer, et la plupart des lossyans n’imaginent pas s’y soustraire.
Chaque lossyan accomplit dans sa vie les bénédictions suivantes:
– Celle de la naissance, où l’enfant est nommé. Officiellement, ce nom, même choisi à la naissance, ne sera donné que passé le troisième mois de vie, pour cause de mortalité périnatale élevée. Ce nom sera béni par un prêtre, au sein du temple, et l’enfant sera alors déclaré officiellement « humain ». Et l’enfant sera inscrit sur les registres du temple.
– Le passage à l’âge adulte : quatorze ans pour les hommes et les femmes, mais cela peut changer selon les régions, plus tôt, ou plus tard. Le rituel est un sacrement public devant l’Espicien local, et la promesse de dévotion, obéissance et fidélité, après quatre jours de jeûne et d’isolement complet des futurs adultes. Tous les hommes présents doivent faire couler leur sang en jurant, toutes les femmes doivent poser les genoux à terre.
– Le mariage : qui est en général une union arrangée, mais moins d’une cérémonie sur deux passe devant un prêtre, chez les lossyans, qui s’arrangent entre eux. Plus cependant le mariage est d’intérêt, et entre familles riches, plus grandes seront les chances qu’il se fasse religieusement. Deux bracelets sont apportés par l’époux, et scellés devant les témoins, la famille, le prêtre, et les notaires, aux bras de l’épouse ; elle ne pourra les retirer qu’en les brisant, l’Eglise ne reconnaissant pas le divorce, cet acte est donc hérétique. Il est assez fréquent aussi que la cérémonie se double de la pose rituelle d’un symbiote de prix, offert par le mari, à son épouse.
– Le rite funéraire: les lossyans n’enterrent pas leurs morts dans des cimetières : les corps sont exposés brièvement pour le rituel funéraire, qui est banalement une dernière bénédiction et un prêche aux vivants, rappelant que le défunt rejoint le cycle immense des vies qui vivent et meurent et se rassemblent dans l’infinie pour rejoindre d’autres mondes et d’autres vies (il n’y a pas de paradis, ni d’enfer, pour le Concile). Puis le corps est incinéré partiellement, ou livré dans la nature aux charognards, en prenant soin de l’enfermer dans une cage permettant d’en prélever par la suite les os nettoyés. Ceux-ci sont alors entassés dans une urne, simple boite, qui sera scellé sous le domaine familiale, ou sous le temple. Pour les pauvres hères sans famille, ni nom, on balance les restes dans un trou, ou à l’eau.
Les interdits, règles et codes courants :
Ces codes, interdits, et règles, sont peu ou prou existants partout, mais sont plus ou moins adaptés, assouplis, ou galvaudés selon les régions. On peut être sûr que c’est pris à la lettre dans l’Hégémonie, mais que dans l’Athémaïs, et surtout à Armanth, tout le monde s’en moque, ou presque.
– Les services de la prostitution sont interdits. Si l’Eglise encourage l’utilisation d’esclaves dans des bordels, ce que l’on nomme les houris, un des statuts les plus misérables de l’asservissement, faire appel aux services sexuels d’une prostituée libre est un crime. L’Eglise chasse -un peu en vain- aussi bien les catins, que leurs clients.
– Manquer une messe du vendredi sans avoir une bonne raison est une faute qui doit être réparée, par un don, en nature, argent, ou service d’intérêt général.
– Ne pas offrir l’hospitalité à un étranger dans le besoin est un crime.
– Manquer de respect (la notion est très vague, et très large) à un ordinatori, ou un de ses assistants direct, est une hérésie.
– Aucune femme -sauf ordinatori- ne devrait : porter d’arme, se battre, diriger des hommes armés, prendre des décisions militaires, commander, posséder une entreprise de plus de trois employés en son nom propre, étudier les Sciences & les Arts (sur Loss, les sciences et les arts sont ce que nous nommerions de nos jours les sciences et arts appliqués, et l’ingénierie. La sculpture est un art dans cette idée là, pas la peinture, sauf celle pour les lieux publics, et la littérature ou la poésie n’en est pas).
– De même, une femme est soumise à l’autorité masculine de sa famille, puis de son époux une fois mariée. Ceux-ci ont tout droit sur elle, à tous points de vue. Une femme qui ne peut prouver qu’elle a une famille, et des tuteurs, ou un protecteur, peut être arrêtée, condamnée, et asservie (procès?.. comment ça procès?… bien sûr que non.)
– Dissimuler, aider, cacher, ou être complice par non-dénonciation, toute personne rousse, ou chanteur de loss, est un crime hérétique puni de mort, et d’asservissement de toute la famille directe du coupable. Ne pas aider l’Eglise à arrêter une personne rousse, ou chanteuse de loss est là aussi un crime majeur.
– Bien entendu, porter atteinte aux intérêts, ou à la personne d’un ordinatori est un délit, voir un crime, et salement puni.
– Il est techniquement interdit d’affranchir une esclave (pas un, mais une). Il est, pareillement, théoriquement interdit de laisser libre un barbare venu de la Terre. Pour les barbares de Loss, la même idée s’appliquait à l’origine, mais il y a longtemps que cette règle a disparue.
– L’Eglise n’admet pas le meurtre d’un lossyan par un autre lossyan. Pareillement, le viol, la torture, les crimes sur personnes mineurs et enfants, sont cruellement et impitoyablement châtiés. Bien sur ces points ne s’appliquent pas aux barbares, bien qu’il y ait eu des cas de condamnation par l’Eglise de crimes abominables à leur endroit.
– L’homosexualité est un tabou pour l’Eglise, dont le rapport qu’elle entretient avec ce cas est très flou : officiellement, c’est un crime hérétique. Mais officieusement, il y a tant de cas au sein de l’ordinatori, et dans les Maison des Esclaves, que finalement, l’Eglise ne condamne que le fait d’afficher l’homosexualité, pas son existence… sinon, elle devrait faire un ménage magistral dans ses propres rangs.
Et le monde prend de l’épaisseur, même dans ses aspects les moins sympathiques… J’aime, Axelle ! Bises !
merci Michel ! ben c’est bien le but, et c’est ainsi qu’on comprends et qu’on voit naitre les rites, les coutumes, les tabous. Le plus drôle, est que les femmes dans le monde de Loss, ont sans doutes plus de droits sur le papier, en général, qu’elles n’en avaient entre l’époque Napoléonienne (haaa, le code Napoléon, qui avait d’ailleurs rétabli l’esclavagisme, aussi… tout un poème), et les débuts du 20ème siècle.